Rwanda/Ngororero : 16.000 personnes disparues !
Au Rwanda le journal pro-gouvernemental « igihe.com » dans son édition du 02 juin 2014 rapporte que 16.000 personnes ont disparu de la région de Ngororero (Gisenyi-Nord du pays). Comme ler apporte le journal, les autorités locales et le ministre de l’Intérieur, James Musoni, minimisent la situation, se contentant d’affirmer que ces personnes sont parties dans d’autres régions du pays à la recherche des terres ou qu’elles auraient rejoint les FDRL (Forces de Libérations du Rwanda) en République Démocratique du Congo (RDC).
Le nombre de 16.000 personnes est impressionnant. Il est impossible qu’un mouvement aussi massif de populations passe inaperçu dans une région donnée du Rwanda. En effet, le territoire rwandais est quadrillé par des militaires. Ils sont éparpillés par petits groupes sur bon nombre de collines du pays. Ils sont secondés par les membres de la défense locale (LDF : Local Defense Force), une milice chargée d’encadrer la population par tranches de 10 ménages.
Il y a également la tentaculaire DMI (renseignements militaires). Ses agents sont parsemés dans le Nord du pays où l’on craint des infiltrations des combattants des FDRL. L’avènement des « Intore » (les élus, les meilleurs) est une autre trouvaille du FPR pour surveiller la population. Il s’agit des personnes choisies et qui passent de maison à maison pour vérifier si leurs occupants sont affiliés au parti FPR, au pouvoir. Au niveau communal, il y a les « abakada » (cadres), et la police communale.
Le citoyen est tenu donc quotidiennement à l’œil par ces structures qui ne lui laissent pas la liberté de mouvement. Même pour une simple visite familiale est assujettie aux formalités administratives : le visiteur doit aller d’abord se faire enregistrer auprès de l’autorité sitôt arrivé dans une localité.
Dans ces conditions, il est clair que ces personnes ont été victimes de « disparitions forcées », c’est-à-dire qu’elles ont été arrêtées ou enlevées par ces milices et ces militaires qui sillonnent les collines en repérant leurs cibles. Ces personnes sont détenues dans des endroits secrets de façon que nul ne sait ce qu’elles sont devenues. Il est évident que cela se fait avec l’acquiescement des hautes autorités du pays car 16000 personnes, c’est toute une région qui a été quasi littéralement vidée de ses habitants.
Les disparitions forcées sont monnaie courante ces derniers temps au Nord du pays. Dans son communiqué du 16 mai 2014, Human Right Watch parle d’un nombre croissant de personnes qui ont été victimes de disparitions forcées ou qui ont été officiellement portées disparues au Rwanda depuis mars 2014. Cette organisation précise qu’un grand nombre de cas sont survenus dans le district de Rubavu, dans la province de l’Ouest. HRW a reçu des informations selon lesquelles certaines victimes de disparitions forcées ont été appréhendées par des militaires de l’armée rwandaise et autres milices qui infestent la région.
Ces disparitions massives dans la région nord du Rwanda sont juridiquement des disparitions forcées selon la définition de HRW, car ces personnes sont privées de leur « liberté par des agents de l’État ou par des personnes agissant avec son consentement, suivi d’un refus de reconnaître la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ».
Il est à rappeler, à l’attention des autorités rwandaises concernées, qu’une disparition forcée est un crime contre l’humanité selon les lois internationales.
Gaspard Musabyimana
03/06/2014
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