Belgique-Rwanda : Incroyable mais vrai ! Kigali s’immisce dans les élections communales belges d’octobre 2018
Aussi incroyable que cela puisse paraître, le régime de Paul Kagame est en train d’imposer des candidats aux partis politiques ou de faire invalider d’autres pour les élections communales du 14 octobre 2018 en Belgique !
Contexte
Les citoyens belges d’origine rwandaise constituent actuellement l’une des importantes communautés de Belges allochtones. Ses membres se sont donc intégrés dans tous les secteurs de la société belge. Certains, surtout les jeunes qui n’ont connu que la Belgique comme seule patrie, commencent même à tâter à la politique.
Cependant, cette communauté rwandaise reste traversée par le clivage qui marque l’histoire et la politique du Rwanda depuis 1994 exacerbée par la conquête du pays par les éléments tutsi issus de l’armée régulière de l’Ouganda sous le commandement de Paul Kagame, conquête qui s’est accompagnée des massacres interethniques depuis 1990. Ces massacres allaient atteindre leur paroxysme en avril 1994 après l’assassinat du président Juvénal Habyarimana le 06/4/1994 quand son avion fut abattu dans le ciel de Kigali par un missile sol-air tiré par un commando envoyé par le même Paul Kagame. Ainsi donc, tout belge d’origine rwandaise est classé soit comme un pro-Kagame, donc un bon ; soit un mauvais selon qu’il est critique envers le régime Kagame ou lié de près ou de loin au régime qu’il a renversé.
Le poids des lobbies
On savait que le régime dictatorial de Paul Kagame disposait de puissants lobbies en Belgique surtout dans la famille politique libérale et dans le monde des affaires. Mais on ne pouvait pas s’imaginer qu’il pouvait s’ingérer ouvertement, et avec arrogance, dans l’exercice de leurs droits politiques de certains citoyens belges. Ce qui, ailleurs, pouvait être jugé intolérable et dénoncé avec fracas, est, en Belgique, endossé et la tendance est même de s’excuser devant Paul Kagame.
Modus operandi : pressions politiques sous amalgames juridiques
Les initiateurs et exécutants de cette opération (les services secrets du gouvernement rwandais, les associations de Rwandais de Belgique liées à l’ambassade : Ibuka, CRB-Rugali), agissent sur deux axes. Après avoir scruté minutieusement les listes des candidats de tous les partis, quand ils y décèlent quelqu’un qui n’est pas un partisan du parti au pouvoir (le FPR), ils crient d’avoir découvert un « négationniste ». Car, pour eux, quiconque critique la dictature du FPR de Paul Kagame ou dénonce les crimes de guerre commis par les combattants tant au Rwanda qu’en RDC, devient « négationniste ».
Même si ces accusations ridicules et non fondées sont juridiquement inopérantes, elles deviennent politiquement destructrices car les Etats-majors des partis veillent à ne pas s’encombrer d’un cas qui leur coûterait des voix en crédibilité, quand leurs adversaires, ceux-là mêmes qui sont des lobbies du FPR de Kagame, pourront clamer que ces partis ont aligné dés « négationnistes et génocidaires » sur leurs listes. Pourtant, au même moment, des agents du FPR vivant en Belgique et même des membres de sa milice « Intore » revenant des entraînements militaires annuels, sont mis sur des listes de ces partis pro-Kagame sans qu’aucune voix n’ose relever ce fait.
Victimes idéales
Quel est le profil de ces candidats aux élections belges qui sont dits « rwandais » ??? et accusés d’être « négationnistes ou génocidaires » ? Si d’aventure celui-ci serait un descendant d’un des révolutionnaire ayant aboli la monarchie féodale en 1959-1961, ou d’un dignitaire ou d’un cadre du régime renversé en 1994, il s’ajoute sur sa tête la charge de « génocidaire ».
Sans faire un inventaire exhaustif des victimes de cette campagne, nous avons noté quelques cas qui sont caricaturaux : un candidat d’un parti a été accusé par les lobbies pro-Kagamé d’être un petit fils d’un des leaders de la Révolution de 1959. Donc, pour eux, un « génocidaire ». Une autre a été accusée d’être la fille d’une journaliste qui donne la parole aux opposants au régime de Kagame. Enfin « l’Ultima ratio regum» de ces puissants lobbies est de dire que les candidats collaborent ou ont collaboré avec une asbl qui ose dire que le FPR de Paul Kagame en général et son armée APR en particulier, ont commis des crimes de guerre et crimes contre l’Humanité et que le régime viole systématiquement les droits de l’homme. Cette association n’invente pourtant rien car elle ne fait que reprendre le contenu des rapports des ONG qui ont été produits à ce sujet.
Hélas, cela suffit pour priver certains jeunes belges d’origine rwandaise de leurs droits politiques sans qu’ils soient défendus par les partis auxquels ils avaient adhéré tellement les lobbies pro-Kagame sont omnipuissants en Belgique.
Vulgarisateurs zélés et écoutés
Il est vrai que la campagne est menée par des vulgarisateurs (pour ne pas dire des Vuvuzela) zélés. En première ligne on trouve un certain Alain Destexhe, un sénateur belgo-rwandais. Celui-ci est plus connu pour ses éclats médiatiques que pour son travail parlementaire. Il a ainsi défrayé la chronique dans des affaires de corruption et de conflits d’intérêts depuis Kinshasa (RDC) jusqu’à Bakou (Azerbaïdjan) en passant par Paris (France). L’autre est la journaliste du Soir connue comme « spécialiste de la région des Grands Lacs surtout du Rwanda », la trop célèbre Colette Braeckman. Grande admiratrice (adoratrice) devant l’Eternel de Paul Kagame (d’abord comme tutsi comme elle l’a affirmé), elle a accompagné sa conquête du Rwanda depuis l’Ouganda dans les années 1987 jusqu’aujourd’hui. Elle n’hésite pas à falsifier grossièrement les faits historiques quand il faut voler médiatiquement au secours de son idole Paul Kagame.
Conclusion
Le problème est essentiellement politique et est donc d’autant plus difficile à résoudre. La portée des attaques du régime de Paul Kagame relayées par ses lobbies de Belgique est d’ordre politique. Les formations politiques démocratiques auxquelles appartiennent ces jeunes devraient avoir le courage d’y répondre car les arguments ne manquent pas. Mais quand on connaît les calculs politiques, les compromis à la « belge »…on ne peut qu’être pessimiste. Quant au volet judiciaire, il est le plus facile à gérer. Les intéressés peuvent se défendre car ceux qui les accusent d’être « négationnistes ou génocidaires » doivent être déférés devant la justice pour donner des preuves de ces graves accusations.
Emmanuel Neretse
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