Rwanda. Accueil des migrants : hospitalité ou trafic d’êtres humains ?
Ces derniers jours, la presse de Kigali a révélé timidement que le Rwanda aurait conclu un accord avec la Libye sous les auspices du HCR et de l’Union Européenne selon lequel le Rwanda est prêt à accueillir des milliers d’immigrants africains parmi ceux bloqués en Libye dans leur tentative de regagner l’Europe.
Interrogé à ce sujet par la presse internationale, le Ministère des Affaires étrangères du Rwanda n’a pas démenti mais s’est contenté de dire que le moment n’était pas venu pour commenter sur ce dossier.
Ainsi donc, après le deal avorté avec Israël pour accueillir au Rwanda, moyennant paiement, les demandeurs d’asile africains que l’Etat hébreux expulse, Paul Kagame récidive avec la Libye cette fois-ci avec la bénédiction du HCR et de l’Union Européenne et sur recommandation de l’Union Africaine.
D’aucuns peuvent s’étonner et se demander comment ce petit pays parmi les moins recommandables et les plus excusables pour accueillir des immigrés s’obstine à vouloir en accueillir contre toute logique!
En effet, le Rwanda avec une superficie de 26.338 km2 (un peu moins étendu que la Bretagne en France qui pourtant compte 4 fois moins d’habitants) avec une population de plus de 12.000.000 d’habitants, est le pays africain avec la plus grande densité de la population au Km2. Il est donc incompréhensible et même caricatural que ce Rwanda de Paul Kagame veuille se hisser au rang des pays d’immigration que sont (et encore pour combien de temps ?) le Canada ou l’Australie par exemple.
D’autres aspects de la vie d’un pays rendent encore cette obsession du dictateur rwandais Paul Kagame incompréhensible. Les 80% de ces 12 millions de rwandais vivent de l’agriculture. C’est dire que les terres deviennent de jour en jour rares et que ce secteur primaire de l’économie ne saurait à lui seul assurer la vie économique de ce pays.
Malheureusement, le Rwanda n’est pas industrialisé et donc n’a presque pas de secteur secondaire, le secteur tertiaire étant encore balbutiant. Seule la Fonction publique peut occuper la majorité des forces vives en dehors de l’agriculture devenue peu rentable et qui ne parvient même pas à assurer la subsistance de la population ; d’où une famine devenue endémique et qui, désormais a reçu l’appellation de “NZARAMBA” (littéralement: je suis permanent).
Conséquences dramatiques: le chômage des jeunes est parmi les plus élevés du monde: plus de 75% des jeunes de moins de 35 ans sont sans emploi. Malgré les tentatives du régime pour cacher cette réalité avec sa fameuse opération de “ techniquer” (Gutekinika) qui consiste à modifier ou à inventer des statistiques pour ne présenter que celles qui parlent en bien pour le régime, tout observateur averti et de bonne foi peut constater les effets de cette situation. Ainsi tous ces vendeurs de journaux à la criée ou dans des kiosques de Kigali sont diplômés d’université en lettres ou en journalisme. Tous ces motards et taxis-vélos ont un diplôme d’ingénieur; presque tous les serveurs dans des bars et restaurants ont un Master en Economie, etc. Pour survivre, ils doivent s’accrocher à ces boulots qui sont loin de correspondre à leur qualification car l’accès à la Fonction Publique ou pour être embauché comme cadre dans une entreprise publique ou para étatique, la concurrence est rude et seuls ceux qui appartiennent à une certaine classe ou ont des “pistons” très forts peuvent y accéder. Une situation tôt ou tard explosive.
Face à ce constat plutôt alarmant sur la situation démographique, économique et sociale du Rwanda de 2019, comment expliquer l’obstination de Paul Kagame à vouloir en rajouter et en être soutenu par les organisations internationales contre toute logique et surtout toute moralité?
La propagande du régime dictatorial de Paul Kagame aura à clamer qu’il accueille déjà des milliers de réfugiés venus des Etats voisins et citera les Congolais et les Burundais. Mais ce qu’elle ne dira pas, mais que les Rwandais savent, c’est que ces réfugiés congolais servent comme monnaie d’échange politique en brandissant le fait que la RDC persécute les “ Tutsi congolais”, d’où ces réfugiés ; et en même temps garder comme une épée de Damoclès suspendue sur le cou de la RDC les rebellions tutsi créées et soutenues par Kagame et dont les chefs militaires mènent une vie de princes au Rwanda et sont en stand-by pour fondre sur la RDC le moment venu. Quant aux Burundais qui restent dans un camp de réfugiés au Rwanda et qui sont dissuadés de rentrer dans leur pays contrairement à leurs compatriotes réfugiés en Tanzanie qui rentrent en masse, il s’agit en réalité d’un vivier de recrutement des combattants en préparation pour aller renverser le régime dit ” hutu” au pouvoir au Burundi et dont la tête a été mise à prix et par l’Union Européenne, ce qui fut avalisé par l’Union Africaine, plan dont l’exécution a été confiée à Paul Kagame.
Paradoxalement, personne n’ose relever le fait que les Rwandais, qui ont fui et continue de fuir le régime dictatorial de Paul Kagame, avoisinent le million. En se limitant à ceux qui sont réfugiés dans les pays voisins comme l’Ouganda, la RDC ou le Congo Brazzaville sans parler de ceux qui sont disséminés en Afrique australe que même le HCR ne peut pas ignorer malgré la fameuse clause de cessation obtenue à coup de forceps, ceux qui prêchent l’hospitalité et le mieux vivre dans le Rwanda de Paul Kagame devrait être plus modestes.
En fait, le calcul de Paul Kagame est cruel dans son cynisme et simple dans son appât du gain. Le dictateur Paul Kagame se fout pas mal du sort des Rwandais et moins encore de celui des immigrés qui viendraient vivre sur le territoire qu’il a conquis en 1994. S’il parvient à toucher des millions pour en accueillir au Rwanda, il sautera dessus car étant sûr que ces immigrés une fois sur place ne tarderont pas à constater qu’ils ne pourront jamais survivre dans ce pays et encore moins s’y intégrer. Ils partiront alors d’eux-mêmes, mais Kagame aura entretemps touché ses millions.
Au lieu de vanter ce marché inique que Paul Kagame a conclu avec la Libye avec la bénédiction du HCR et qvec le financement de l’UE, disons plutôt ouvertement qu’il s’agit bel et bien d’un trafic d’êtres humains et donc que la responsabilité du HCR, de l’UE et de l’UA se trouvera engagée en tant que complices du crime de trafic des êtres humains. Ce qui serait immoral et surtout historique! A moins s’ils se désolidarisent et tempèrent cet appétit démesuré et cynique du gain du dictateur tutsi Paul Kagame du Rwanda.
Emmanuel Neretse
Bruxelles, le 11 août 2019
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