Rwanda/FPR. Noces de perle, noces de sang ?
Le monde connaît une année 2020 pour le moins riche en événements. Le COVID19 bien sûr, la crise économique mondiale, les tensions sociales aux Etats-Unis, mais aussi pour ceux qui s’intéressent à l’actualité en Afrique de l’est, un feuilleton dramatique qui se déroule en ce moment même dans la région des Grands Lacs. Pour rappel, il y a un peu plus de 2 mois le Burundi a perdu son président sortant (Pierre Nkurunziza) mort dans des circonstances encore inexpliquées. Dans le même temps le président rwandais Paul Kagame manque aussi à l’appel, puisqu’il n’est plus apparu en public depuis plusieurs mois, on ne le voit qu’en photo ou sur des vidéos dont l’authenticité est questionnée par beaucoup ; ce qui donne lieu à des déclarations extraordinaires de l’abbé Thomas Nahimana ainsi que de l’opposant Kayumba Rugema sur leurs chaines Youtube respectives. Le plus frappant néanmoins étant les silences très parlants de la part du régime de Kigali et de ses chiens de garde. Aucun démenti ferme et officiel, aucune apparition publique du président pour faire taire définitivement les rumeurs. Nous voilà donc avec un président burundais mort et enterré depuis 2 mois, et un président rwandais supposé décédé ou du moins dans l’incapacité d’exercer ses fonctions depuis 6 mois.
La dernière fois que nous nous sommes retrouvés dans une situation où les présidents rwandais et burundais ont disparu dans un laps de temps aussi court, c’était il y a un peu plus de 26 ans. Il s’en est suivi un cauchemar et une souffrance terrible pour le peuple rwandais et notamment le génocide commis contre les Tutsis vivant au Rwanda à l’époque. Si l’on rajoute à cela les tensions régionales entre le Rwanda et le Burundi, entre le Rwanda et l’Ouganda, et les incursions et les accrochages entre groupes armés interposés, dans ces pays et dans la RDC voisine, l’on obtient la recette idéale pour un embrasement généralisé de la région. Tous les signaux sont au rouge.
On peut faire une petite analogie avec la catastrophe nucléaire de Tchernobyl dont le déroulement est très bien relaté dans l’excellente série télévisée du même nom sortie l’année dernière sur HBO. On peut y voir comment l’arrogance et l’ignorance de certains conduisit à la pire catastrophe nucléaire de l’histoire (les bombardements de Hiroshima et Nagasaki mis à part). En effet de nombreux signes semblaient indiquer l’imminence d’un accident et toutes les mesures qui auraient pu être prises pour éviter la catastrophe ou tout du moins la contenir quelques heures avant qu’elle ne survienne, ont été ignorées par une hiérarchie aveuglée par son orgueil et sa suffisance.
Nous sommes dans la même configuration au Rwanda actuellement, tout clignote, tout sonne, les signaux sont là pour qui veut bien voir au-delà du « miracle rwandais » que l’on nous sert à toutes les sauces depuis des années. C’est ainsi que « la communauté internationale » détourne le regard et laisse faire ses pantins de Kigali dévorés par leur orgueil et aveuglés par leur vanité, et complètement hermétiques aux revendications du peuple rwandais. Nous nous dirigeons vers une nouvelle catastrophe, vers l’apocalypse si rien n’est fait pour contrer la toxicité du régime de Kigali pour toute la région.
Du moment où l’APR a envahi le Rwanda depuis l’Ouganda en octobre 1990, la région n’a plus jamais connu la paix. Peut-être ne connaitrons-nous jamais vraiment la vérité mais il semblerait que dès les premiers jours de l’invasion le mouvement rebelle ait été détourné et vampirisé par une clique sanguinaire, dirigée par le général futur président Paul Kagame. Clique avide de pouvoir et d’argent et aux ambitions géopolitiques expansionnistes inédites dans l’histoire récente de l’Afrique. C’est en tout cas ce qui ressort des différents témoignages d’anciens officiers historiques du mouvement aujourd’hui en exil.
L’APR et le FPR de Kagame ont vendu aux Rwandais exilés et à ceux de l’intérieur une guerre de « libération » du Rwanda alors que leur véritable dessein était bien plus sombre : la mise en coupe réglée du pays et la mise en esclavage de tous les Rwandais qu’ils soient Hutus, Tutsis, Twas ou autres ainsi que de leurs voisins afin de les exploiter sans relâche jusqu’à ce que mort s’en suive. Ils ont vendu cette histoire de libération au monde entier et ils ont fini par y croire eux-mêmes.
Héros panafricanistes modernes, visionnaires chevauchant le zèbre de la renaissance africaine, lumières éclairant le continent noir…
Sauf que la façade a commencé à se fissurer dévoilant ce que les rwandais savent déjà depuis longtemps : les libérateurs ne sont pas des héros mais des bandits, des mafieux qui n’hésitent pas à corrompre et à infiltrer les pays hébergeant des réfugiés rwandais de tout bord et de toute ethnie afin de les terroriser ou de les tuer à tour de bras, pillant sans vergogne la RDC et procédant à l’essorage méthodique du peuple rwandais dans son ensemble. Ils n’ont pas mené une guerre de libération en 1990, c’était une guerre de soumission. Ce n’était pas un retour d’exil mais une campagne de colonisation qui dure depuis presque 30 ans. Les noces forcées du FPR avec le peuple rwandais ne nous ont pas amené la paix et l’unité mais la prospérité pour certains et les pleurs et la misère pour les autres.
Nous commémorerons les 30 ans de l’irruption du FPR dans le quotidien des Rwandais et 30 ans de vie commune. Cela s’appelle des noces de perle. Espérons que ce ne seront pas des noces de sang.
Ghislain Mikeno
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