Les FDU Inkingi demandent à la République du Niger de respecter l’accord signe avec le Mécanisme International des Tribunaux Pénaux

Les FDU-Inkingi, parti politique d’opposition au régime rwandais du Front Patriotique Rwandais ( FPR), remercient la République du Niger pour avoir accepté d’héberger sur son territoire les huit personnes de nationalité rwandaise qui ont été jugées par le Tribunal Pénal International pour le Rwanda, à Arusha en Tanzanie, tribunal créé par la Résolution 955 du 8 novembre 1994 du Conseil de Sécurité des Nations Unies pour juger les crimes graves de droit humanitaire international qui se sont déroulés au Rwanda entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994. Les huit personnes accueillies au Niger sont des personnes qui, soit ont été acquittées, soit ont purgé leurs peines et sont donc libres.

 

A la fermeture du Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR), un mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles de ces tribunaux pénaux (le }Mécanisme Résiduel~) a été créé par la résolution 1966 (2010) du Conseil de Sécurité des Nations Unies. La division d’Arusha pour ce Mécanisme Résiduel est entrée en fonction le 1er juillet 2012, et le 1er janvier 2015 ce Mécanisme Résiduel a hérité de la réinstallation des personnes acquittées et libérées par le TPIR.

 

Le 25 juin 2020, la Résolution 2529 du Conseil de Sécurité des Nations Unies a souligné qu’il importait de trouver des solutions durables pour les personnes qui avaient été acquittées ou libérées mais qui restaient bloquées à Arusha (dans une résidence sécurisée dite  »Safe House »).

C’est ainsi qu’un accord a été signé, le 15 novembre 2021, entre la République du Niger et le Mécanisme Résiduel en vue de réinstaller neuf personnes au Niger.

 

Une des personnes ayant préféré ne pas être transférée au Niger, ce sont huit personnes qui y ont été transférées, à savoir :

  1. Prosper MUGIRANEZA
  2. Tharcisse MUVUNYI
  3. Anatole NSENGIYUMVA
  4. André NTAGERURA
  5. Alphonse NTEZIRYAYO
  6. François-Xavier NZUWONEMEYE
  7. Innocent SAGAHUTU
  8. Protais ZIGIRANYIRAZO

 

L’accord conclu entre les deux parties stipule notamment :

Art-5 : L’octroi par la République du Niger, du statut de résident permanent et des pièces d’identité pertinentes aux ressortissants rwandais cités.

Art-6 :

1er alinéa : Chacune des personnes acquittées ou libérées s’engage à respecter les lois de la République du Niger.

3ème alinéa : En cas de non-respect par des personnes acquittés ou libérées des lois de la République du Niger, en particulier celles relatives à leur statut de résident permanent en République du Niger, ou en cas d’atteinte ou de menace à l’ordre public, la République du Niger informera le Greffier du Mécanisme Résiduel par écrit de cette violation et en consultation avec le Greffier prendra les mesures nécessaires.

Art-7 :

Alinéa 1 : Interdiction de traduire en justice de la République du Niger ou d’un autre pays les personnes acquittées ou libérées pour les faits pour lesquels elles ont été jugées.

Alinéa 2 : Interdiction d’extrader ou de céder de quelque manière que ce soit, ces personnes à la République du Rwanda ou à un autre Etat en vue de les juger pour les mêmes faits.

 

Les FDU viennent d’apprendre que le ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation de la République du Niger a pris la décision, en date du 27 décembre 2021, d’expulser dans les sept jours ces huit personnes récemment accueillies sur son territoire, en invoquant des raisons diplomatiques, sans plus.

 

Les FDU-Inkingi regrettent et s’étonnent considérablement de cette mesure brutale et qui ne respecte pas l’accord du 15 novembre 2021 signé entre le ministre nigérien des Affaires Etrangères et de la Coopération et le Greffier du Mécanisme Résiduel. En effet la décision d’accueillir ces personnes sur le sol nigérien a été signé par le premier diplomate du pays, à savoir son ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération, alors que l’arrêté d’expulsion pour des raison diplomatiques vient d’être pris par le ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation.

 

En outre, l’art-6, alinéa 3 de l’accord signé entre la République du Niger et le Mécanisme Résiduel, prévoit qu’en cas de violation des dispositions de l’accord, le gouvernement de la République du Niger doit informer par écrit le Mécanisme Résiduel et discuter avec lui. Or, ici, non seulement cette procédure n’a pas été respectée mais en plus le délai donné aux expulsés est terriblement court de sorte que le risque que ces personnes se retrouvent à la merci du gouvernement rwandais est particulièrement élevé. Rappelons que ces personnes étaient, avant la victoire militaire du FPR en juillet 1994, opposées au FPR et que par conséquent ce dernier a toutes les raisons de chercher à les rapatrier au Rwanda pour les réduire au silence malgré qu’elles aient été acquittés pour les unes et libérées après avoir purgé leurs peines pour les autres.

 

D’ailleurs cet Accord mentionne expressément dans son article 7, alinéa 2, l’interdiction de transférer ces personnes ou de les céder de quelque manière que ce soit à la République du Rwanda pour être jugées pour les mêmes faits.

 

Le gouvernement rwandais qui s’est toujours insurgé contre les acquittements et les libérations prononcés par le TPIR ou le Mécanisme Résiduel envers des prévenus, s’est une nouvelle fois insurgé par la voix de son ambassadrice aux Nations Unies, Mme Valentine Rugwabiza, lors de son adresse au Conseil de Sécurité du 13 décembre 2021, regrettant notamment que son gouvernement n’aurait pas été informé de l’accord du 15 Novembre 2021 entre le Mécanisme Résiduel et le Niger concernant le transfert de ces huit personnes d’Arusha vers le Niger. Ce gouvernement usera donc de tous les moyens pour tenter de récupérer ces huit adversaires politiques pour les réduire au silence.

 

En outre, rappelons que les familles de ces personnes ont fui le Rwanda et les exactions du FPR et ont pu trouver refuge à l’étranger. Rapatrier au Rwanda ces huit personnes acquittées et libérées reviendrait donc à les condamner gratuitement et à les couper définitivement de leurs familles.

 

Nous demandons donc au gouvernement de la République du Niger de revenir sur cette décision inhumaine et d’entamer, comme prévu dans l’accord du 15 novembre 2021, les discussions adéquates avec le Greffier du Mécanisme Résiduel en vue de trouver une solution qui respecte l’Accord conclu, la volonté de l’état nigérien de résoudre les problèmes diplomatiques invoqués dans sa décision et surtout les droits de ces huit personnes acquittées et libérées.

 

 

Fait à Paris, le 29 décembre 2021,

 

Dr Emmanuel MWISENEZA
Premier Vice-président

 

 

 

 

 

 

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