Agression de la RDC par Rwanda. Situation au Nord Kivu arrêtée au 14 novembre 2022

SITREP 1 [Situation Report 1]

 

Opérations militaires sur le terrain

 

Globalement en ce mi-novembre 2022, les combats continuent dans le Bwisha, Groupement Rutshuru entre les FARDC et l’Armée de Kagame sous l’étiquette de M23.

 

Après les frappes de l’aviation congolaise sur les dépôts des munitions du M23, les opérations au sol sont aussi menées cette fois-ci à partir du Nord (vers Butembo) et se rapprochent de Kiwanja et Rutshuru Centre. Au même moment, le M23 menace et tente de se rapprocher de Goma et surtout de maintenir son contrôle sur la seule route joignant Goma à Rutshuru et le reste, en passant par le camp militaire de Rumangabo qu’il occupe depuis une semaine.

 

Le vendredi 11 novembre 2022, les combats ont été signalés sur deux fronts. Au Sud, l’armée congolaise fait face à l’armée de Kagame dite M23 dans la zone de Rugari à une trentaine de kilomètres de la ville de Goma. Les détonations de l’artillerie sont perçues jusqu’à Kibumba dans le territoire de Nyiragongo. Mais les deux parties (les FARDC d’une part et l’armée de Kagame du M23 d’autre part) se refusent de donner la situation opérationnelle et encore moins de bilan, mais se contentent de dire que les opérations continuent. Sur le front Nord du Rutshuru, il y a eu aussi de violents combats entre Mabenga et Kahunga. Les FARDC ont repris le pont de Mabenga, sur la Route Nationale 2 qui relie Rutshuru-Kiwanja à Kanyabayonga. Les combats restent intenses.

 

Politiquement et diplomatiquement

 

Ce 15 novembre 2022 doit s’ouvrir à Nairobi au Kenya le nouveau round des pourparlers entre les groupes armés et le gouvernement de la RDC. Mais seuls les groupes armés ayant accepté de déposer les armes y seront admis. Or, le M23 a justement repris l’offensive et donc s’est automatiquement exclu de ce processus selon le Gouvernement de la RDC. Avis que partagent le médiateur désigné Uhuru Kenyata et le Président en exercice de l’EAC, le burundais Evariste Ndayishimiye qui seront d’ailleurs à Nairobi pour présider ces assises.

 

Toujours du côté de la diplomatie, le président angolais Joao Lourenço, qui préside la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL), est arrivé le vendredi 11 novembre  à Kigali, la capitale rwandaise pour jouer les médiateurs entre les deux pays. Il a continué à Kinshasa le samedi 12 novembre où il a eu un entretien de deux heures avec le président congolais Felix Tshisekedi. Et le dimanche 13 novembre 2022 , c’est l’ancien président kényan, Uhuru Kenyatta, facilitateur de l’UA, qui est arrivé à Kinshasa pour rencontrer le président congolais, Félix Tshisekedi dans le cadre de peaufiner la rencontre du 16 novembre à Nairobi entre les groupes armés congolais de l’Est (Sud-Kivu, Nord-Kivu, Ituri) ayant accepté de déposer les armes et non “terroristes” et le gouvernement de la RDC. Entretemps ce 12 novembre 2022, les premiers éléments du contingent du Kenya au Nord Kivu sont arrivés à Goma où sera  installé leur Quartier Général. Reste à voir où ils vont être déployés et les règles d’engagement fixées dans leur ordre d’opération.

 

Sur le plan politique interne en RDC, le président de la République a rencontré les représentants des communautés hutu et tutsi comme le reporte la presse.

Un exercice auquel devrait plutôt s’adonner Paul Kagame en réunissant autour d une même table Hutu, Tutsi et Twa rwandais!

 

Influence de la politique et la diplomatie sur les opérations militaires et vice-versa

 

Dans le cas présent, la situation politique et diplomatique risque d’être conditionnée par les opérations militaires. Le M23 (donc Kagame) étant politiquement exclu du processus car il lui est demandé de déposer les armes sans conditions, doit leur prouver qu’il est incontournable en s’emparant d’autres territoires et en insistant à conclure que les FARDC ne peuvent jamais le vaincre et que c’est donc à lui de dicter les conditions de faire la paix.

 

Etant en réalité l’armée de Kagame et soutenu sournoisement par l’Ouganda lui-même partie prenante pour le démantèlement des groupes armés en RDC, le M23 comptant sur ces atouts et la complaisance de la Communauté Internationale (l’Occident) envers Kagame, campe sur ses positions et se renforce au lieu de déposer les armes.

 

Après tout Kagame n’a retenu et n’applique qu’un seul principe en la matière. A savoir que: “la parole diplomatique serait d’autant mieux écoutée et respectée s’elle peut aussi sortir de la bouche d’un canon calibre 7,5mm d’AK 47”! Et il l’applique invariablement dans ses guerres de conquête depuis 1990.

 

Acquisition du matériel de guerre surtout l’aviation et l’artillerie anti-aérienne

 

Kagame savait que la RDC est en possession des avions de chasse dans son armée de l’air. Mais il lui est géographiquement difficile de disposer d’avion de chasse sans accord avec les pays voisins. Par exemple quand un avion de chasse est lâché en l’air, en 5 minutes il a déjà parcouru une distance dépassant la longueur ou la largeur du Rwanda. A titre illustratif, pour que la Belgique ait des escadrilles d’avions de chasse F16 et autres, elle dispose d’abord de l’ouverture sur la Mer du Nord et puis elle a des accords avec des Etats voisins que sont l’Allemagne, la France, les Pays Bas et le Luxembourg tous membres de l’OTAN. Sinon chaque fois qu’un F16 ou un autre du 10è Wing s’envolerait à partir de la base aérienne de Kleine-broguel au Limbourg même pour l’entraînement, il violerait, en moins de deux minutes, l’espace aérien d’un pays voisin, un “casus belli”. Pour dire que la Belgique serait donc en permanence en conflit avec ses voisins.

 

Mais le Rwanda de Kagame s’est doté d’un système de défense aérienne des mieux sophistiqués et performants du monde. Il les a acquis de Chine et ce système de missiles est équipé de radars qui peuvent détecter tout aéronef dans l’espace aérien jusqu’à 250 km et ces missiles ont une portée de plus de 50 km.

 

Ce n’est donc pas parce que Kagame ne savait pas que les FARDC avaient des avions de chasse mais c’est que, voulant maintenir le flou comme quoi le M23 serait une rébellion qui n’a rien à voir avec son armée, il ne pouvait pas engager de moyens anti-aériens dont une rébellion ne peut pas se doter car aucune rébellion ne peut s’acheter un avion ou un système de missiles de longue portée et en dissimuler les preuves.

 

Comme tout aéronef décollant, atterrissant ou stationné à l’aéroport de Goma peut être facilement atteint même par les tirs d’un simple canon ou même de mortier à partir de la colline de Rubavu à Gisenyi donc au Rwanda qui surplombe Goma. Mais Kagame se garde de le faire car il n’aurait pas d’autres échappatoires pour nier l’agression. Mais jusqu’à quand? “That is the question!”

 

Désinformation et fabrication de Fake News

 

Face à cette réalité, Paul Kagame et ses relais médiatiques sont réduits à user de la désinformation et des fake news à la mode. Pour fournir des armes à son M23, ces médias déclarent que ce sont des armes abandonnées par les FARDC dans leur fuite. Mais le hic est que cet armement soi-disant pris à l’ennemi n’est pas d’usage dans les FARDC. Comment peut-on récupérer une arme à l’ennemi alors que celui-ci n’a jamais possédé ce type d’armes?

 

Aujourd’hui, le M23 et les médias pro-FPR disent avoir récupéré des chars de combat à Kiwanja qui auraient été abandonnés par les FARDC en fuite. Mais le problème est que les FARDC n’ont jamais possédé cette marque de chars. En plus ces armes abandonnées par les FARDC sont directement et intensément utilisées avec leurs munitions par ce M23, alors que si elles étaient réellement abandonnées, ce serait sans munitions.

En fait il s’agit d’une astuce pour Kagame de justifier le surarmement de son M23 alors qu’une simple rébellion ne pourrait être si armée.

 

Fausses déclarations et photos détournées

Sachant que les grands médias internationaux lui sont acquis, Paul Kagame en use et en abuse et fait tourner à fond ses services secrets et de propagande à l’effet de désinformer l’opinion. Dans le cas présent (invasion du Nord Kivu sous la couverture du M23, les services de Paul Kagame tentent de faire admettre le fait que la “méchante et maudite” Russie aide intensément la RDC en lui envoyant des chars de combat par centaines, lesquels sont engagés contre le “gentil et humanitaire” M23 !

 

Devant l’énormité de ce mensonge, même les médias français dans lesquels Paul Kagame fait passer ses INFOX comme France 24 et sa maison-mère France Médias Monde, s’en offusquent. Même RFI, pourtant porte-voix de Kagame, s’en étonne et l’a fait savoir dans le reportage de sa journaliste.

 

En effet, il est dit et images en appui, que la RDC recevrait l’appui de la Russie avec l’arrivée de nombreux chars de combat. C’est ce qu’aurait affirmé Armelle Charrier, éditorialiste en politique internationale à France 24, à en croire plusieurs publications sur les réseaux sociaux ces derniers jours. Des photos sont présentées comme des preuves censées montrer l’arrivée de ces blindés dans le pays.

 

Grâce à une recherche par image inversée, on découvre que les clichés présentés comme des preuves de l’arrivée de chars russes en RDC, sont eux aussi manipulés.

La première photo, sur laquelle on voit des blindés débarqués d’un avion de transport russe, montre en réalité le déploiement de casques bleus dans la région du Haut-Karabakh en 2020.

Quant au deuxième cliché sur lequel on voit une colonne de tanks progresser dans un chemin de terre, elle a été prise en 2017 par un photographe de l’agence Tass en Russie. Il s’agissait alors d’un exercice conjoint entre l’armée russe et indienne.

Ces images n’ont donc aucun rapport avec la République Démocratique du Congo. Certains internautes l’ont bien remarqué mais cela n’empêche pas l’infox de circuler grâce aux réseaux de Paul Kagame.

 

L’activisme actuel de la diplomatie régionale pour tenter de faire cesser cette guerre d’agression pousse paradoxalement Paul Kagame à mettre le paquet pour radicaliser ses terroristes du M23 et leur faire conquérir d’autres régions en RDC. En effet, le porte-parole de ce groupe terroriste à qui curieusement la presse occidentale tend ses micros et caméras, alors qu’il n’en feraient pas autant pour celui de l’Etat Islamique ou DAESH, a déclaré à la BBC et VOA le 11 novembre 2022, qu’ils ne reculeront du sol congolais d’aucun centimètre, mais au contraire qu’ils vont pourchasser les FARDC jusqu’à Goma et s’il le faut jusqu’à Kinshasa. Se faisant, Kagame compte ainsi mettre devant un fait accompli les Etats et organisations qui s’activent dans cette crise, pour qu’ils poussent  plutôt la RDC à abdiquer devant ses M23 et lui accorde tout ce qu’il exige. “Après tout, dira Kagame, le M23 est militairement plus fort que les FARDC. Celui qui doit céder est donc tout désigné”.

 

Ainsi les rencontres et sommets de Luanda, Nairobi, Bujumbura ou ailleurs… vont tous accoucher d’une souris.

 

Voila le jeu du FPR/ Kagame et son M23 dans cette guerre de conquête et par procuration.

 

A suivre.

 

Emmanuel Neretse

Le 14 novembre 2022

 

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