Paul Kagame en guerre en RDC. Alerte
Nouveau tournant: quand les éléments du M23 deviennent des FDLR et vice-versa, au moment où les députés provinciaux rwandophones du Nord Kivu rejoignent le M23.
Une ingénieuse campagne de désinformation rondement menée pour justifier et même légitimer l’agression de la RDC par l’armée de Paul Kagame.
Situation et contexte
Tous les observateurs sont unanimes pour dire que le commandement des FARDC (presque tous les officiers supérieurs et généraux) semblent moralement démobilisés par les alléchantes déclarations et feuilles de route signées depuis novembre 2022 comme quoi Kagame devrait évacuer son armée des zones conquises au Nord Kivu sans que les FARDC ne tirent un coup et donc sans risque pour aucun militaire de perdre la vie. Chaque officier se dit que “ce n’est pas le moment de mourir sur le front alors que la guerre va finir et la belle vie commencer”.
Ils sont dans le même état d’esprit que ceux des FAR au Rwanda après le protocole d’Accord sur l’intégration des deux armées (APR et FAR) signé à Arusha en juin 1993. Depuis cette date, les officiers supérieurs des FAR furent moralement démobilisés pour ne plus combattre et cela par les politiciens arrivés au pouvoir en 1992 et qui attendaient le garder une fois rejoints par le FPR comme le prévoyaient ces accords et une fois Habyarimana éliminé comme déjà acquis.
A l’Etat Major, au ministère de la Défense, au conseil du gouvernement, des réunions interminables se tenaient jour et nuit pour voir quel officier occuperait tel poste dans le nouvel organigramme comprenant le FPR. Chaque politicien voulant promouvoir l’officier qu’il jugeait son proche et chaque officier pressenti faisant tout pour paraître méritant d’être un haut gradé dans l’armée de l’après Habyarimana et surtout considéré comme un “rescapé politique” des FAR auprès du FPR.
Parallèlement, les autres officiers qui se savaient déjà écartés d’avance veillaient à sauver au moins leur peau car leur carrière militaire devait se terminer avec Habyarimana. Et la boucle de démobilisation morale de tous les cadres était bouclée! Ce n’est qu’après le 06 avril 1994 qu’ils ont tous compris le jeu des politiciens, mais hélas !, c’était trop tard!
Une illustration ubuesque de cette situation que vivait le commandement des FAR en 1993
Avant même que l’ancre apposé sur les papiers d’Arusha ne sèche, le ministère de la Défense, pressé par les alliés du FPR membres du gouvernement, rendait public la liste des officiers devant faire partie du Haut Commandement dans la nouvelle armée.
Lorsqu’il fut demandé au FPR d’en faire autant, la réponse fut moqueuse mais instructive. Paul Kagame répondit en se moquant d’eux que “le moment n’était pas encore venu et que de toute façon, la méthode des effets d’annonce n’était pas la leur.”
Jusqu’à la reprise des hostilités en avril 1994, on ne connaissait pas encore quels officiers devaient être membres du fameux Haut Commandement, hormis les nigauds des FAR qui d’ailleurs n’en feront jamais partie.
Et pendant que les officiers supérieurs des FAR militairement et surtout moralement démobilisés et aiguillonnés par des politiciens mal inspirés, étaient occupés au “partage de la viande d’un gibier qu’ils n’avaient pas encore abattu”, le FPR lui plantait ses jalons et se préparait à une phase de la guerre autrement plus intense et décisive ( ya Rurangiza) que toutes les premières depuis 1990.
Le parallèle avec la situation actuelle dans la guerre que le même Paul Kagame a imposée aux FARDC au Nord Kivu
Le M23 de Paul Kagame se fout pas mal des ultimatums et des plans de son retrait régulièrement soumis depuis novembre 2022. Au contraire, sachant que c’est le bon moment, car les officiers FARDC sont moralement démobilisés par ces annonces de fin des hostilités et donc qu’aucun d’entre-eux ne souhaiterait laisser sa peau au front alors que la guerre est théoriquement finissant, Kagame et son M23 s’emparent d’autres zones et localités, sachant très bien qu’au final, c’est le rapport des forces sur le terrain qui va compter dans toute solution envisagée.
Ainsi, rien qu’après le sommet de l’UA d’Addis Abeba de ces 18 au 19 février 2023, le M23 vient de s’emparer du double, sinon du triple des positions qu’il avait conquises avant Luanda en novembre 2022. Entretemps, les FARDC comptent toujours sur l’évacuation de ces zones sur simple appel lancé au “gentil et compréhensif ” M23 de Kagame!
Et cerise sur le gâteau !: les députés provinciaux rwandophones du Nord Kivu viennent de lancer un appel solennel (ou plutôt un ultimatum) au Gouvernement central de Kinshasa de négocier immédiatement avec le M23 (et surtout pas avec le Rwanda) des conditions de ramener la paix au Nord Kivu.
Autrement dit, le M23 vient de se doter d’un Parlement avant de nommer son gouvernement du Nord Kivu. Vous avez dit: Balkanisation” ?
La campagne proprement dite
Au Rwanda même et plus particulièrement dans les régions du Nord-Ouest frontalières de la RDC, une campagne médiatico-politique bat son plein et est soigneusement menée, que même les analystes les plus fins seraient abusés. Ainsi, chaque jour, les radios, les journaux contrôlés par le régime, diffusent et publient sur les réseaux sociaux, que les combattants Hutu des FDLR rentreraient au Rwanda en désertant le front des combats en RDC. La parole leur est largement donnée mais pour dire qu’ils étaient bien des FDLR et qu’ils combattaient dans les rangs des FARDC. Les plus zélés et prompts à reproduire la leçon apprise affirment même que les FARDC n’existeraient pas mais qu’en réalité ce seraient les FDLR qui font la guerre au M23/Kagame.
Comme on peut le constater, cette campagne est sponsorisée et médiatisée par les puissances les plus influentes au Monde et auxquelles rien ne résiste. C’est donc dire l’importance qu’elle revêt dans la tactique et la stratégie qu’entend mener Paul Kagame en RDC à court et à moyen terme.
C’est ainsi que le Dr. Ron Adam, ambassadeur d’Israel au Rwanda, est allé visiter le Centre de rééducation de Mutobo à Ruhengeri (rebaptisé Musanze), où on lui a présenté des soi-disant combattants des FDLR qui seraient rentrés de RDC et que le régime a bien accueilli et qu’il va même réintégrer dans leurs milieux d’origine. L’Ambassadeur s’est même soumis à la cérémonie de distribution des biens de première nécessité à ces “ex-FDLR” qui allaient regagner leurs collines d’origine. Il en a témoigné dans un Tweet ci- joint diffusé le 23 février 2023:
Mais tout rwandais de bonne foi et surtout habitant les régions de Ruhengeri et Gisenyi (rebaptisées Musanze et Rubavu) sait très bien qu’il s’agit des militaires de Kagame enrôlés dans le M23 pour envahir le Nord Kivu et quand ils sont relevés pour le repos avant d’être renvoyés au front, sont présentés comme des FDLR pour appuyer l’argumentaire de Kagame comme quoi, les FARDC seraient coalisées avec les FDLR ce qui justifierait son intervention en RDC.
Paul Kagame vient d’ailleurs de le souligner, à savoir qu’il a le devoir d’aller combattre les FDLR en RDC et pas d’attendre qu’elles arrivent sur le sol rwandais.
Ayant dit cela, il entend évoluer dans les justifications de sa guerre d’agression en balayant les précédentes qui n’ont pas tenu et en promouvant cette nouvelle trouvaille mais qui était en réserve. D’où le moment choisi pour cette campagne politico-médiatique de transformation des M23 en FDLR au Rwanda et vice-versa en RDC.
Succession des justifications de son agression à la résurrection du M23
Paul Kagame a d’abord déclaré que la raison pour laquelle il a fait ressusciter le M23 mort en 2013 quand il fut chassé par la Brigade spéciale de la MONUSCO composée alors des contingents de la Tanzanie, Afrique du Sud et Malawi, serait que le gouvernement de la RDC n’aurait pas appliqué les accords conclus avec ce M23 avant qu’il ne soit chassé. Il n’a jamais révélé le contenu de ces accords et encore moins pourquoi c’est lui qui était chargé de les faire appliquer.
Voyant que ce prétexte ne tenait pas la route, il a alors clamé que les Tutsi congolais du M23 retranchés au Rwanda intervenaient en RDC pour y arrêter le génocide des mêmes Tutsi qui s’y commettait ou risquait de s’y commettre.
Le gouvernement congolais ayant été le premier à dénoncer tout discours appelant à la haine ethnique et à sévir contre quiconque le tiendrait sur son territoire, contrairement à quoi s’adonne Kagame, ce dernier a été confondu et a changé son fusil d’épaule.
Sa dernière trouvaille fut alors d’accuser la RDC d’utiliser les mercenaires dont les russes du fameux groupe Wagner. Une accusation d’autant plus grave qu’elle est à la mode et qu’elle rend celui qui en est accusé un pestiféré et même un ennemi à abattre par l’Occident.
Mais en ce qui concerne la RDC, l’accusation ne peut pas prendre car même si ce pays a acquis du matériel militaire fabriqué en Russie et donc dont le maniement et l’entretien doivent être initiés aux congolais par des techniciens et instructeurs du fournisseur, il n’est pas le seul au monde et surtout pas par rapport au Rwanda de Kagame. En effet, l’armement individuel de chaque des 150.000 soldats de Kagame est le Kalachnikov inventé et souvent fabriqué en Russie, sans parler de certaines armes d’artillerie lourde ou légère. Pourquoi il n’est pas pestiféré par le même Occident pour cela? Bien plus, il est le collaborateur direct du groupe Wagner (certes pour l’épier pour le compte de l’Occident) partout où ce groupe est présent ouvertement en Afrique: Centrafrique, Mozambique, Soudan, etc.
Toutes ces justifications de Kagame pour envahir la RDC sous couvert du M23 non seulement ne pouvaient pas tenir la route, mais en plus elles ont gêné et continuent de gêner les puissances qui l’ont créé et le soutiennent depuis trois décennies car elles savent et suivent à la minute les déploiements militaires auxquels Kagame s’adonnent à travers la frontière du Rwanda et la RDC. Même sans satellites ou drones d’observation et les écoutes de communications dont ils ont la maîtrise, leurs services sur place dans la région connaissent bien la réalité.
Face aux évidences, Paul Kagame toujours comme à son habitude, et sûrement sur recommandation de ses conseillers de l’Occident, est amené à changer d’argumentaire.
Actuel jeu de la carte des FDLR
Comme toujours depuis 1994, le bouc émissaire et prétexte idéal pour permettre au régime de Paul Kagame de massacrer une catégorie de rwandais ou de déstabiliser les pays voisins, reste le groupe des FDLR. De façon que même s’il n’existait pas, Kagame le créerait comme c’est le cas actuellement.
Fabrication de preuves
Dans la situation actuelle (conquête des territoires du Nord Kivu par son armée sous la couverture du M23 depuis mi-2022), Kagame a plus que jamais besoin de preuves pour justifier cette agression flagrante dénoncée même par ses traditionnels alliés ou protecteurs.
Paul Kagame doit donc tout faire pour faire des show qu’il doit agiter comme des preuves comme quoi les FARDC qu’il combat au Nord Kivu, et qu’il chasse de certaines localités, seraient en réalité “des FDLR, ces génocidaires hutu l’ayant fui en 1994 et qui tenteraient de revenir achever le génocide des Tutsi au Rwanda”.
Conséquences possibles et espérées par P. Kagame
En jouant cette tragi-comédie avec comme acteur principal le M23 en FDLR, Paul Kagame espère obtenir de la communauté internationale, la légitimité et l’impunité pour envahir la RDC rien qu’en brandissant l’épouvantail FDLR. Et hélas !, cela risque de marcher tellement le dictateur de Kigali est conseillé et aiguillonné par les lobbies qui conditionnent l’opinion mondiale.
Difficultés de distinguer le vrai du faux
Kagame et ses lobbies sont facilités dans cette tâche de désinformation par le fait qu’il est difficile au premier venu de distinguer un M23 d’un FDLR : ils parlent tous les deux Kinyarwanda, ils connaissent tous les deux le terrain d’opération qu’est le Nord Kivu : les FDLR pour y être nés et y avoir évolué depuis lors, les M23 pour y opérer militairement et de façon continue depuis plus de dix ans quand ils avaient pris même la ville de Goma.
La seule manière de distinguer le vrai du faux serait de confondre les acteurs RDF/M23 déguisés en FDLR qui sont exhibés aux médias à Mutobo ou à Gisenyi, en les soumettant aux analyses critiques des journalistes rigoureux, des chercheurs, des ONG rompus à cet exercice. Ces spécialistes des médias et des ONG de défense des Droits de l’Homme ne tarderaient pas à révéler que:
Ceux qui sont présentés comme des combattants des FDLR, considérant leur âge, sont tous nés après 1994;
Ils sont donc censés ne pas avoir jamais mis les pieds au Rwanda et donc ne connaissent pas les collines ou localités d’origine de leurs parents, sauf de noms .en conséquence qu’ils n’ont aucune attache sur ces collines.
Ces nouveaux “FDLR” de 2023 jouissent d’un traitement de faveur plus que leur prédécesseurs, car ceux qui furent refoulés par la RDC comme étant des FDLR même étant civils, ont soit été physiquement éliminés soit jetés en prison et condamnés à de lourdes peines dont le minimum est ”la réclusion à perpétuité”.
Les services du régime de Kagame se ridiculisent en médiatisant les scènes montrant ses agents distribuer des kits aux soi-disant combattants des FDLR qui retourneraient sur leurs collines de naissance pour y refaire la vie. Alors qu’il s’agit des militaires de RDF de Kagame qui opéraient en RDC comme M23 et qui rejoindront leurs unités ni vus ni connus et dont on n’entendra plus parler.
Tâche et possibilités des services de la RDC
La RDC a donc la tâche de dénoncer cette campagne diabolique de Paul Kagame. Les services du gouvernement de la RDC ont largement les possibilités de le faire et efficacement. Une seule indication pour ne pas donner des idées au FPR.
Il suffirait de donner publiquement la parole aux prisonniers de guerre ayant appartenu aux M23 Kagame et actuellement aux mains des FARDC pour qu’ils dénoncent leurs anciens compagnons d’armes au M23 et aujourd’hui devenus “comédiens” et présentés comme étant des FDLR au Rwanda en précisant les unités auxquelles ils ont appartenus au sein des RDF et puis au M23 en RDC et où ils furent engagés ensemble que ce soit à Bunagana ou Kibumba en passant par Rutshuru ou Kiwanja.
Il y a urgence car Paul Kagame entend avoir préparé suffisamment l’opinion pour qu’il déclare officiellement entrer en RDC pour y combattre les FDLR et cela avant le dernier ultimatum (qui comme toujours ne sera pas respecté) donné à son M23 d’évacuer toute les positions conquises pour au plus tard le 30 mars 2023. Entretemps il aura tout fait pour que sur le terrain il apparaisse comme “le plus fort” et donc incontournable. D’où ses conquêtes fulgurantes de ces derniers jours qui lui ont permis de cerner Goma, le seul objectif majeur qui lui reste et dont il peut s’emparer d’un moment à l’autre s’il le voudrait.
A bon entendeur, Salut!
Emmanuel Neretse
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