Procès du Dr Rwamucyo à la Cour d’Assises de Paris, France. 4è semaine. Synthèse hebdomadaire des audiences et commentaires d’Emmanuel Neretse
Au cours de cette semaine du lundi 21 au vendredi 25 octobre 2024 qui s’achève, le procès est entré dans sa dernière ligne droite car les dépositions des parties sont terminées et les plaidoiries ont commencé. Le procès est donc à sa fin.
Les audiences de la semaine sont apparues sans intérêts pour beaucoup d’auditeurs en quête de vérité et de justice. Mais pour nous, l’intérêt est que ce fut une occasion de concrétisation caricaturale des procédés normalement inacceptables dans un procès judiciaire, mais ici appliqués une Cour dans un procès politique.
Ainsi toute la semaine fut consacrée aux témoins à charge venant du Rwanda pour se constituer des nouvelles parties civiles. En tout, ils étaient 9 femmes et un homme. En outre, le reste du temps fut accordé aux responsables des organisations et lobbies pro-FPR ayant porté plainte contre l’accusé notamment CPCR, SURVIE, IBUKA-France. Ce fut une occasion en or pour étaler leur toute puissance et leur main-mise sur la justice en France et en Belgique.
Observations particulières à cette semaine
On a noté de nouveaux témoins à charge venant ou parlant à partir du Rwanda mais jamais auparavant cités et donc inconnus et introuvables dans le dossier, et pourtant admis à la dernière minute par le président et imposés à la Cour et programmés pour déposer en dernier pour clore les audiences ; comme cela, défense n’aura aucune occasion de connaître qui est le nouveau témoin pour éventuellement le contredire par d’autres dépositions, ni même le contre-interroger sur des points précis, celui-ci ayant reçu la consigne de ne jamais répondre aux questions de la défense surtout à celle de savoir comment et quand il a su que le procès du Dr Rwamucyo allait se tenir à Paris pour qu’il décide de venir déposer et se porter partie-civile
Cas Marcel Kabanda.
Les séances des dernières dépositions des parties ont été marquées par un individu qui, non seulement a étonné certains, mais surtout en a énervé d’autres. Pendant plusieures heures, cet individu a monopolisé la parole en se présentant et en tentant de prouver qu’il était omniscient et polyvalent, et comme tel, une machine multifonctionnelle.
Son profil est déroutant. Il est présenté comme un citoyen français né au Rwanda. Il est dit qu’il est historien de formation et avocat de profession.
Comme activités extra-professionnelles, il dit appartenir à plusieurs associations et organisations de la société civile. Ainsi, il est président d’IBUKA-France, membre et collaborateur du CPCR du couple Gauthier, collaborateur de FIDH en France.
Quand on lui demande comment et pourquoi il est impliqué dans cette affaire, ses explications permettront de le connaître davantage. En effet il dit en substance ceci:
Comme il est Tutsi, il se considère comme “rescapé du génocide rwandais de 1994”, même si à cette époque il était bien en sécurité et à plus de 6 000 Km de là. Et pour ce fait, il doit se porter “ partie civile” dans tous les procès dans lesquels les Hutu sont accusés.
Comme président de IBUKA-France et membre ou collaborateur de FIDH, SURVIE ou CPCR,…, il est aussi automatiquement plaignant quand ces organisations portent plainte contre un quelconque Hutu en France.
Comme “avocat”, il est naturellement avocat des parties civiles des personnes physiques ou morales résidant au Rwanda et qui se portent parties civiles à chaque procès intenté aux Hutu en France.
Enfin comme membre influent du parti-Etat au pouvoir au Rwanda depuis 1994, le FPR, il est son agent en Europe et comme tel informateur et contact avec les étrangers ignorant tout du Rwanda mais voulant s’en informer. Parmi eux, on retrouve des curieux, des aventuriers ou des opportunistes voulant profiter eux aussi de l’aura des Tutsi à travers le monde et de l’impunité dont jouit le régime rwandais malgré des crimes de guerre et des crimes contre l’Humanité même de génocide qu’il a commis et continue de commettre. C’est dans ce cadre qu’il a travaillé et collaboré toujours avec les personnes autrement infréquentables comme Jean Pierre Chrétien ou Jean François Dupaquier.
Les rwandais ou les vrais spécialistes du Rwanda auront reconnu Monsieur Marcel Kabanda.
Observations générales en cette fin du procès
Tous les procès concernant le génocide rwandais de 1994 ne répondent pas à une logique judiciaire ou ne sont pas intentés dans un soucis de rendre justice. Que ce soit au Rwanda même, au TPIR, devant les Cours d’Assises de Paris et de Bruxelles, ces procès sont dans le cadre d’une “justice des vainqueurs jugeant les vaincus”. Exactement comme vient de le publier le politologue canadien Patrick Mbeko dans son denier livre : « Rwanda : Malheurs au vaincus 1994-2024 » (Paris, Editions Duboiris, avril 2024).
Ces procès entrent donc dans le cadre de raffermir le régime des conquérants tutsi qui se sont emparés du Rwanda venant d’Ouganda en 1994. Et pour cela il faut lui débarrasser des opposants possibles à sa dictature, en les éliminant juridiquement et ainsi leur faire taire à jamais.
Les procès ont aussi pour but de faire taire les voix qui mettraient en cause la réécriture de l’Histoire du Rwanda en cours par le même régime dictatorial incarné par Paul Kagame. Est également dans le collimateur toute personne (historien, journaliste, sociologue, politologue, …) qui oserait dire, écrire et démontrer que le FPR de Paul Kagame, a attaqué le Rwanda dans sa soif de revanche contre la Révolution sociale de 1959 qui a banni la monarchie féodale du Rwanda pour la remplacer par une Démocratie républicaine.
Il en est de même de quiconque ose souligner que la guerre déclenchée en octobre 1990 pour prendre le pouvoir au Rwanda quel qu’en soit le prix, fut à la base du déclenchement du génocide de 1994. Cette personne doit être réduite au silence par tous les moyens y compris des procès d’Assises.
En France, le régime dictatorial du FPR/Kagame dispose d’une puissante machine destinée à faire la chasse aux Hutu ayant le profil décrit donc pouvant porter ombrage à la dictature du général Kagame. Cette machine doit les écraser et pour cela elle dispose des moyens adéquats et performants. Aux commandes de cette machine à broyer du Hutu en France se trouve le CPCR, une boîte du couple Dafroza et Alain Gauthier. Il est rappeler que Daphroza, d’origine rwandaise, a par ailleurs ayant des liens familiaux avec l’entourage immédiat du dictateur Paul Kagame notamment son bras droit le général James Kabarebe. Le couple a été décoré officiellement par le président Paul Kagame pour services rendus.
Le CPCR des Gauthier se voit chaque fois rejoint par les organisations et lobbies pro-Kagame de France comme SURVIE, IBUKA-France, FIDH, LICRA, … dans cette chasse aux Hutu opposés au FPR.
Enfin, la tâche des chasseurs de têtes des Hutu de France pour le compte du régime Kagame que sont le CPCR des Gauthier et consorts, est facilitée par la procédure particulière aux Cours d’Assises.
Pour rappel, dans une Cour d’Assises, ce sont les jurés populaires tirés au sort qui jugent si l’accusé est coupable ou non après avoir entendu les deux parties: l’accusation et la défense ; les juges professionnels n’étant chargés que de diriger le procès selon les procédures légales et de traduire les décisions des jurés en termes juridiques.
Théoriquement, chaque partie doit donc convaincre les jurés de ce qu’elle avance et alors aux jurés de décider celle qui les a le plus convaincus.
Mais la réalité est que les jurés sont pilotés par les juges professionnels car ceux sont eux qui préparent les questions auxquelles ces jurés doivent répondre par “oui ou non” et à l’unanimité, sans voix discordante.
Sans taxer les juges des cours d’Assises comme n’étant pas libres ou sous influence, force est de souligner qu’ils doivent chaque fois tout faire pour que la Cour condamne.
En effet, pour qu’une affaire soit déférée devant une cour d’Assises (là où elles existent encore), un juge d’instruction et le procureur (ministère public) doivent avoir d’abord été convaincus qu’il y aura absolument condamnation de l’accusé. Car autrement, les deux magistrats concluraient à un non-lieu et l’affaire serait classée.
C’est pourquoi quand il y a procès, le président de la Cour fait tout pour permettre à l’accusation de tout faire pour émouvoir, épater, impressionner les jurés même par des récits fantaisistes ou des scènes de comédie (pleurs, sanglots simulés, …).
C’est pourquoi également, devant les autres cours et tribunaux qui ne sont pas des cours d’Assises et dans lesquels ce sont les juges professionnels qui délibèrent et décident librement en âme et conscience du verdict et de la sentence, il y a souvent des acquittements. Ainsi par exemple, le TPIR d’Arusha créé par l’ONU en novembre 1994 et qui avait inculpé 93 Hutu durant 25 ans de son existence, tout en condamnant 61 d’entre eux en a acquitté 14. En plus, le TPIR a retiré les actes accusations pour 2 des inculpés et a conclu que 6 des inculpés ne seront jamais jugés.
Mais sur la même période, devant les Cours d’Assises de Paris et de Bruxelles avec beaucoup plus d’inculpés, jamais d’acquittement contre un Hutu n’a été prononcé même ceux contre qui les accusateurs n’avaient pas de preuves des crimes dont ils les accusaient car il s’agissait de procès politiques.
Il est alors facile de comprendre le pourquoi de la spécificité des cours d’Assises en France et en Belgique.
Toute la journée du vendredi 25 octobre 2024 sera accordée aux parties civiles pour leurs plaidoiries.
Pour la 5è semaine de ce procès, soit du lundi 28 au jeudi 31 octobre 2024, le programme s’annonce réduit et serré en conséquence. Ainsi, l’avant-midi du lundi 28/10 sera consacré aux réquisitions, tandis que l’après-midi sera le seul moment donné à la défense de faire sa plaidoirie alors que l’accusation (ministère public, parties civiles) en a eu plus de 2 jours ! Il s’en suivra alors les délibérations.
Sauf contre-temps, le verdict est attendu pour jeudi le 31 octobre 2024.
Emmanuel Neretse
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