Rwanda : incendies à répétitions ou terrorisme d’Etat
Presque jour pour jour, des incendies inexpliqués éclatent dans bon nombre de coins du pays. Que cachent-ils ? Essai d’explication.
Genèse
Le 5 juin 2014, un incendie a ravagé la prison centrale de Muhanga (Gitarama). Un mois après, soit le 7 juillet, la prison de Rubavu (Gisenyi) a été attaquée par un incendie. Le 9 juillet, un énorme incendie s’est déclaré dans un quartier commercial en plein centre de la ville de Kigali. Quatre magasins ont été détruits.
Le 14 juillet, une minoterie située dans la zone industrielle de Gikondo, un quartier de la banlieue de Kigali, a pris feu. Le jour suivant, le 15 juillet, un incendie a ravagé un bâtiment situé à côté de la Gare Routière de Nyabugogo (faubourg de la capitale Kigali). Le 16 juillet, des flammes se sont déclarées dans une décharge d’une usine au Bugesera.
D’après la police, dans tous ces incendies, il y a eu d’énormes dégâts matériels mais il n’y a pas eu de morts ou de blessés, hormis à Gisenyi.
Que cachent ces incendies à répétitions
Des explications diverses ont été données.
Des uns y ont vu la volonté des hommes d’affaires proches du régime du FPR d’imposer l’achat du matériel anti-incendie à tout citoyen rwandais. Le marché est énorme. Les sociétés d’assurance y trouveront elles aussi leurs comptes car une obligation dans ce sens est également un gros marché. Le gouvernement s’est empressé effectivement de légiférer dans ce sens.
Une autre raison de ces incendies serait politique. Le régime rwandais, incarné par le Front Patriotique rwandais (FPR) va faire d’une pierre deux coups. Il va faire endosser ses incendies sur le dos des FDLR, ces combattants hutu à l’Est de la RDC. En même temps, il va opérer des rafles à l’intérieur pour se débarrasser de ses opposants qu’il va qualifier de pyromanes.
D’habitude le gouvernement rwandais s’empresse de communiquer quand un incident, si mineur soit-il, se produit. On l’a vu quand il y a eu des explosions de grenades dans la ville de Kigali. Quelques minutes après, la police déclarait que les fauteurs de troubles avaient été appréhendés. Dans le cas de ces incendies, c’est silence radio. A peine, une commission a été mise sur pied pour déterminer les tenants et les aboutissants de ces incendies. Le résultat est connu : le ton a été déjà donné par la presse proche du régime comme « Rwanda Today » qui, après s’être posé la question de savoir « Qui incendie les prisons rwandaises ? », donne tout de suite une réponse : « Des sources pointent du doigt les FDLR (Forces Démocratiques de Libération du Rwanda) basées et opérant dans l’Est de la RDC frontalier avec le Rwanda ».
Des incendies criminels des prisons
Des observateurs avisés font une autre analyse. Le FPR, dans ses visées criminelles aurait trouvé une autre astuce pour se débarrasser des Hutu qui sont grandement majoritaires dans ces prisons. Il a commencé par Muhanga (Gitarama). Il a tout de suite déclaré qu’il n’y a eu aucune victime car les détenus ne se trouvaient pas dans leurs cellules quand le feu s’est déclaré. Or, selon la Croix Rouge Internationale, les cellules de 3 500 détenus ont été détruites par les flammes dans cet établissement d’une capacité d’au moins 6 000 personnes.
A moins d’un miracle, vu l’ampleur des flammes, il est impossible qu’il n’y ait pas eu de victimes. De plus, aucune source indépendante n’a vérifié que ces prisonniers étaient en dehors de leurs cellules au moment où s’est déclaré l’incendie.
Ces cellules étant fermés à clé de derrière, nul ne s’est risqué pour aller les ouvrir pour libérer les prisonniers par crainte d’être lui aussi emporté par le feu. Aucun doute que les victimes se comptent par milliers.
Cette expérience ayant été concluante, ce fut le tour d’un autre grand établissement pénitencier du pays, Rubavu (Gisenyi). Là, la police a parlé de 3 détenus décédés et de 40 blessés. Ces informations sont également à prendre avec des pincettes. Des milliers de prisonniers ont sans doute péri dans les flammes.
Quand on sait que des prisonniers au Rwanda sont majoritairement des Hutu, on comprend que personne ne s’en émeuve outre mesure car on se dit : après tout c’étaient des « génocidaires ».
Selon toujours des commentateurs divers, les autres incendies qui ont suivi dans la foulée ont été organisés pour faire diversion et faire oublier la mise à mort par le feu des milliers de prisonniers à Gitarama et à Gisenyi.
Jane Mugeni
17/07/2014
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